LA PERMACULTURE DU CLIENT : CHRONIQUE 2
L’entreprise comme moteur d’un écosystème vertueux
On ne peut parler de Permaculture du client sans d’abord comprendre la réalité « écosystémique » de la permaculture.
Ayant personnellement un potager de 400m2 et travaillant dans le marketing et la communication depuis plus de 25 ans, les parallèles entre le marketing et le maraîchage m’apparaissent aujourd’hui plus évidents que jamais : tous deux étaient généralement faits avec beaucoup d’enthousiasme et beaucoup d’agitation pour des résultats parfois assez loin des attentes !
Voici les premiers rapprochements que j’ai fait entre maraîchage et marketing :
- Tout commence par le « sol ».
Il faut bien observer, analyser et comprendre le sol sur lequel nous cultivons.
– Si le sol est riche et vivant, il sera facile d’y faire pousser tout ce que nous désirons.
– Si le sol est appauvri et dépossédé de ses nutriments essentiels, l’effort pour y faire pousser quoi que ce soit sera important et les résultats peu fructueux.
Il en est de même pour cultiver l’expérience clients dans l’entreprise.
- L’alimentation en eau n’est pas un détail : sans eau, pas de culture.
Il faut identifier dès sa planification comment le potager sera alimenté en eau et quel système d’irrigation sera le plus approprié. La transposition de « l’eau » au marketing, c’est le potentiel de marché. Sans marché, pas de ventes.
– Comment écouler sa production ?
– Vers quel marché ?
– Quel sera le système de distribution le plus approprié ?
– Comment évaluer son coût ?
Sont autant de questions essentielles qu’il faut se poser (et valider) en amont.
- On ne peut pas faire fi du climat : il ne se contrôle pas !
Mieux vaut « faire avec » dans la planification du jardin…comme dans la stratégie marketing.
Les conditions démographiques, sociales, environnementales et économiques, mais aussi, le climat dans la tête des prospects et clients sont autant d’éléments sur lesquels nous n’avons pas d’emprise, dont nous devons tenir compte.
- Il faut respecter les saisons : il est un temps pour chaque chose et chacune des saisons cadence le travail de l’année.
La tomate de plein champ ne pousse pas l’hiver, alors rien ne sert de la planter à l’automne. Cependant si nous ne faisons pas de semis en hiver nous n’aurons pas nos plants à temps pour la belle saison.
En marketing aussi, il faut comprendre « les saisons » de nos clients et prospects afin d’ajuster au plus près les actions à prévoir.
- Le hasard fait parfois bien les choses… mais le succès ne vient pas de nulle part.
Apprendre de ses échecs nous semble évident, mais comprendre ses succès est essentiel pour arriver à reproduire les conditions gagnantes.
Le maraîchage comme le marketing se travaillent en utilisant des méthodes itératives où l’on teste, mesure et améliore en continu.
- Il n’y a pas de recette miracle : malgré tous les livres écrits, sur le marketing comme sur le maraîchage, il n’y a pas de solution toute faite et applicable partout qui soit durable.
Parce que justement, chaque jardin, chaque entreprise, doit se développer au départ des cinq points précédents.
Ces parallèles sont simples et évidents, et lorsqu’on applique ces éléments au marketing dans une entreprise, on peut dire que les fondamentaux sont en place.
Mais il y a des années lumières entre le maraîchage « traditionnel » et la permaculture. En marketing aussi.
Le choc permaculturel : prendre conscience de cette puissance inutilisée
C’est en voulant « mieux » travailler mon propre potager pour y consacrer moins de temps et d’énergie, qu’avec mon mari Patrick (et associé dans Maïeutyk France) nous nous sommes intéressés de plus près à la permaculture.
Ce que nous y avons trouvé allait beaucoup plus loin que nous ne l’imaginions : il ne s’agissait pas d’une super-méthode de maraîchage visant l’amélioration des rendements et la réduction des coûts, mais plutôt une vision globale, basée sur une observation extrêmement poussée du fonctionnement des écosystèmes naturels.
« Les écosystèmes naturels sont durables, autonomes, résilients. Si nous comprenons en profondeur comment ils fonctionnent, en prenant ces écosystèmes comme modèles, nous pouvons créer des habitats humains plus durables et autonomes. »
La Permaculture, Perrine & Charles Hervé-Gruyer, p. 36 et 91
Autrement dit : il ne s’agit plus de regarder le jardin maraîcher dans un mode linéaire : d’un côté on y met des intrants (compost, engrais, semences) et du travail et de l’autre on en récolte des légumes et des fruits.
Car cette conception linéaire de la production ne tient pas compte du fonctionnement naturel du jardin. Tous les efforts sont orientés vers les planches de culture : on y passe beaucoup de temps à désherber, à arroser régulièrement pour éviter la sécheresse, à mettre le bon engrais au bon moment pour nourrir les plantes, prévenir les insectes ravageurs en installant des pièges ou en utilisant des insecticides, intervenir (souvent chimiquement) dès qu’une bactérie s’attaque à un arbre fruitier ou qu’un parasite vient manger le fruit de nos durs labeurs. Dans ce système, chaque élément remplit une seule fonction, qui doit être répétée continuellement pour continuer d’opérer (désherber, arroser, fertiliser…).
Par contre dans le fonctionnement en écosystème, le jardin maraîcher est un maillon d’un système plus large qui fonctionne en boucle, où chaque élément du système profite aux autres et reçoit d’eux. Ainsi la terre est nourrie par les déchets des saisons précédentes (incluant les mauvaises herbes) et les crottins d’animaux le cas échéant. D’ailleurs ces animaux auront aussi comme fonctions de désherber ou même de labourer la terre. Les insectes jouent un rôle de pollinisateurs mais aussi de gendarmes et même d’engrais. Le paillage permet de conserver une meilleure hygrométrie du sol et viendra plus tard enrichir le compost qui nourrira ensuite la terre…
Le terme même de « permaculture » vient à l’origine de l’anglais «permanent culture » qui pourrait se traduire par « culture durable » c’est-à-dire un système de culture pérenne pouvant apporter une auto-suffisance alimentaire mais aussi fournir d’autres éléments comme le bois pour se chauffer et les fibres pour isoler les bâtiments et fabriquer de quoi se vêtir.
Loin du modèle linéaire, on voit donc qu’en permaculture, le jardin maraîcher a d’autres valeurs et utilités que la simple production de fruits et légumes.
Et si on appliquait aussi ce raisonnement aux entreprises?
Ce sera le sujet de la chronique 3 : Pour la révolution permaculturelle de l’entreprise.
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